(Rivages Poche, 7,50€, 192 pages)
ISBN : 2-7436-0170-1
"Un écrivain japonais célèbre, émigré aux États-Unis, se suicide en laissant un recueil de nouvelles écrites en anglais. Le livre ne sera jamais publié au Japon: chaque traducteur commençant la quatre-vingt-dix-huitième nouvelle meurt. Au cours d'un été étrange, Kazami, l'amie du dernier traducteur, découvrira la vérité. Et elle finira par croire que "tout ce qui s'est passé était beau... D'une beauté violente, à en perdre la raison".
N.P. ("North Point") est un roman dont l'apparence est celle d'un roman policier: mystère d'un recueil de nouvelles dont les traducteurs sont morts suicidés avant d'avoir achevé la translation de la 98ème...
Mais très vite un décalage se fait sentir: le mystère et l'enquête cèdent le premier plan à une étude approfondie des relations existant au sein d'un quatuor assez complexe, un peu comme un huis clos - que j'ai trouvé parfois étouffant: Une frère et sa soeur, un amour incestueux avec une étrange demie soeur, une amie liée à eux par le suicide de son amant.
En fait, si la fameuse 98e nouvelle est présente tout au long du roman, elle n'est que prétexte à autre chose. Prétexte à décrire le fameux été vécu par les quatre personnages: Kazami, Saki, Otohiko et Sui. Pour Kazami, la narratrice, cet été constitue une parenthèse flamboyante à côté de laquelle l'ordinaire semble un peu morne. Elle a l'impression de vivre dans un roman intense. On peut aisément se reconnaitre dans cette sensation, ce souvenir si fort d'une période qui a été idéalisée et dont un événement particulier marque la fin. Une période que nous regardons avec émerveillement, malgré les fêlures et les drames qui s'y sont joués. Une parenthèse, quoi.
Au final, le mystère est plus un prétexte qu'autre chose: le fil directeur du roman réside dans une analyse quasi clinique des relations des personnages de cet univers qui ont tous en eux une fêlure, une fragilité derrière le sourire, une candeur délicate qui les rend plutôt attachants.
L'écriture est subtile, poétique et imagée bien qu'un peu trop sucrée. On peut facilement imaginer les images volées, les sensations décrites. Les dialogues semblent jurer avec le reste.
CHALLENGE ABC
Banana Yoshimoto (吉本 ばなな, Yoshimoto Banana) est une écrivaine japonaise née à Tōkyō en 1964. Son vrai nom est Mahoko Yoshimoto. Elle est la fille du poète et critique littéraire Takaaki Yoshimoto.
Elle s'est fait connaître grâce à son roman Kitchen (1987, publié en France en 1994), et vendu à plus de 2,5 millions d'exemplaires au Japon.
Ce roman, comme la plupart de ses livres suivants, parle de la perte, du deuil, avec une touche de surnaturel.
Elle fait partie de la nouvelle génération d'écrivains japonais, un peu plus individualistes par cette façon de tout traiter à la première personne, mais elle reste très poétique, grâce à son phrasé que l'on retrouve au fil de ses écrits. Banana Yoshimoto a un univers, touchant et drôle à la fois ; les thèmes sont parfois d'une simplicité extrême, mais ce qui intéresse Banana Yoshimoto est surtout d'instaurer cet univers très personnel, et très rêveur. Les femmes japonaises se sont beaucoup reconnues dans ses œuvres, surtout Kitchen, qu'elles ont plébiscitées.
En 1986, elle fut récompensée par le Izumi Kyoka Prize, le grand prix des arts de l'Université de Nihon pour la nouvelle Moonlight Shadow (éditée avec Kitchen), puis en 1987 par le Kaien Magazine New Writer Prize, un prix soutenant les nouveaux écrivains pour Kitchen.
Sur ma PAL/LAL :
Kitchen
Lecture : Janvier 2010