(Folio, 6,10€, 228 pages)
ISBN : 978-2-07-035964-6
L'auteur : Dai Sijie, né dans une petite province chinoise, en 1954. Biographie
En 1971, comme des millions d'autres jeunes citadins chinois, le narrateur et son ami Luo sont envoyés sur une haute montagne isolée voisine du Tibet, où ils seront "éduqués" par les paysans. Les adolescents ont trois chances sur mille de revenir un jour dans leur ville natale. Dans le village voisin, un autre jeune de la ville cache scrupuleusement une valise remplie de livres interdits : Balzac, Flaubert, Hugo, Kipling, Emily Brontë, Rousseau, Dostoïevski... Grâce à ces trésors, la ravissante petite tailleuse, jeune fille convoitée par tous, ne sera plus jamais la même. Écrit avec un accent de vérité confondant, un roman fort qui, tout en nous plongeant dans la Chine communiste, raconte une belle histoire d'amitié et d'amour, auréolée de la magie de la littérature.
C’est sur une toile de fond un peu trop tragique que prennent place les protagonistes. Les deux jeunes Luo et Ma, considérés comme des intellectuels risquant de dévoyer, sont envoyés dans un village aux confins du Tibet, dans la vallée de Phoenix. En effet, Mao et ses idéologues préconisent la rééducation des intellectuels au contact de la nature et des paysans. Toute littérature étrangère est interdite et celui qui est surpris en possession d’un livre non-autorisé par le gouvernement subira les peines les plus dures. Ils seront coupés de tout, voués aux tâches les plus difficiles et auront des conditions de vie plus pénibles que les autres villageois. Les deux jeunes garçons contourneront l’interdit et feront partager leur amour de la littérature étrangère - notamment des grands classiques français (d'où Balzac) et russes dont ils ont tous les deux le goût - à la fille du tailleur de la vallée dont ils sont épris, la petite tailleuse.
Balzac et la Petite Tailleuse chinoise est un roman qui pêche par sa naïveté et ses bons sentiments quelque peu exagérés. Néanmoins, il demeure un témoignage important sur cet épisode de l’histoire de la Chine maoïste évoquée avec plus ou moins de justesse. En effet, si la Révolution culturelle donna à la Chine une audience internationale exceptionnelle, ce nouvel épisode de l’histoire chinoise se traduisit par un immense désastre pour les Chinois : les écoles et les universités furent longuement fermées, privant le régime de futurs cadres compétents. Cet épisode consomma la rupture entre le Parti et les intellectuels et conduisit à un nouveau recul de la production. Le roman de Dai Sijie, s’il demeure une fiction, n’en demeure pas moins un témoignage réaliste concernant cette sombre période de l’histoire. Mais il constitue également un témoignage précieux sur la puissance de la littérature sans laquelle nos deux jeunes héros ne conçoivent pas de vivre pleinement.
Lecture : Février 2009