(Robert Laffond, 22,00€, 539 pages)
Barcelone, années 1920. David Martin, dix-sept ans, travaille au journal La Voz de la Industria. Son existence bascule un soir de crise au journal : il faut trouver de toute urgence un remplaçant au feuilletoniste dominical. Sur les conseils de Pedro Vidal, chroniqueur à ses heures, David est choisi. Son feuilleton rencontre un immense succès et, pour la première fois, David est payé pour ce qu'il aime le plus au monde : écrire.
ISBN : 978-2-221-11169-7
"Je t'emmènerai dans un endroit secret où les livres ne meurent jamais et où personne ne peut les détruire..."
En plein succès, David accepte l offre de deux éditeurs peu scrupuleux : produire à un rythme effréné des feuilletons sous pseudonyme. Mais après quelques années, à bout de force, David va renoncer. Ses éditeurs lui accordent alors neuf mois pour écrire son propre roman. Celui-ci, boudé par la critique et sabordé par les éditeurs, est un échec. David est d'autant plus désespéré que la jeune fille dont il est amoureux depuis toujours - et à laquelle le livre est secrètement dédié - va épouser Pedro Vidal.
Son ami libraire, Sempere, choisit ce moment pour l emmener au Cimetière des livres oubliés, où David dépose le sien. Puis arrive une offre extraordinaire : un éditeur parisien, Corelli, lui propose, moyennant cent mille francs, une fortune, de créer une texte fondateur, sorte de nouvelle Bible, « une histoire pour laquelle les hommes seraient capables de vivre et de mourir, de tuer et d être tués, d offrir leur âme ».
Du jour où il accepte ce contrat, une étrange mécanique du meurtre se met en place autour de David. En vendant sa liberté d écrivain, aurait-il vendu son âme au diable ? Épouvanté et fasciné, David se lance dans une enquête sur ce curieux éditeur, dont les pouvoirs semblent transcender le temps et l espace.
Réactualisant le mythe de Faust, Zafon reprend les ingrédients de la recette à succès de L’ombre du Vent, il y rajoute une forte pincée de fantastique, de gothique, de gore et nous sert un plat qui ne manque pas de piquant.
Tout comme avec L'Ombre du Vent, impossible une fois encore de lâcher Le Jeu de l'Ange, qui se dévore très vite. Certes, on retrouve Barcelone et certains des personnages qui ont fait la force de son premier essai. Cela ne gêne pas la lecture. Quelle imagination une fois de plus! Un petit bémol cependant: après avoir fait brillamment monter la sauce durant les deux premiers tiers du roman, le dernier tiers retombe un peu comme un soufflé, la fin semble confuse et menée un brin trop rapidement. L'auteur n'a pas cherché à exploiter à fond les énigmes qu'il a mis tant de pages à tisser tout au long du roman mais cela stimule l’imagination. Et l'épilogue, des plus étranges, peut laisser sur sa faim.
Au-delà de l’intrigue romanesque, Le Jeu de l’ange est également irrigué par la passion de la littérature à laquelle le héros a consacré sa vie. Car David est un homme d’encre et de papier, pour qui vivre et écrire ne font qu’un. C’est pourquoi la mention du Cimetière des livres oubliés n’est pas ici seulement un clin d’œil au roman antérieur. Cette cathédrale du livre est là pour nous rappeler l’acte de foi du libraire Sempere, qui « croyait que tant qu’il resterait une seule personne dans ce monde capable de lire et de vivre les livres, il subsisterait un petit morceau de Dieu ou de vie », profession de foi à laquelle s’associe vraisemblablement Carlos Ruiz Zafón.
Ce livre reste, néanmoins, passionnant, tant par l'histoire que par le style, et que l'auteur nous tient en haleine du début à la fin. Un fort bon moment de lecture malgré l’odeur de soufre et de sang qui en émane.
Carlos Ruiz Zafón (né le 25 septembre 1964 à Barcelone) est un auteur espagnol. Ruíz Zafón écrit principalement en castillan. Il habite depuis 1993 à Los Angeles où il écrit des scénarios de films.
A l'âge de quatorze ans, Carlos Ruiz Zafon écrit son premier roman, une histoire truculente de 500 pages. À dix-neuf ans, il choisit pourtant de faire carrière dans la publicité, qu'il quitte rapidement pour se consacrer à son roman El principe de la niebla (Le prince du brouillard, 1993) qui a gagné le prix de la jeunesse d'Edebé en 2000.
Son quatrième roman, L'Ombre du vent, un roman qui a reçu un accueil chaleureux de la critique, a été traduit en de nombreuses langues. Il a été sélectionné dans les romans étrangers pour le prix Femina 2004. Il a reçu aussi de nombreux prix, en France, le Prix des Amis du Scribe et le Prix Michelet en 2005, au Québec, le Prix des libraires du Québec 2005 (Roman hors Québec).
Du même auteur : ~L'Ombre du Vent ~
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